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Temps de lecture : 5 minutes

À Lausanne, dans le quartier Sévelin, le restaurant Quai 14 mêle gastronomie et réinsertion professionnelle. Dans ses cuisines, Karim signe aujourd’hui sa première recette à la carte.


Derrière les grandes baies vitrées du restaurant Quai 14, les casseroles s’entrechoquent et les tabliers s’activent. À première vue, rien ne distingue ce restaurant des autres adresses lausannoises. Mais, ici, certains plats racontent une histoire. Celles notamment de femmes et d’hommes en réinsertion, venus retrouver un rythme, une confiance, une place dans le marché du travail.

Un projet ambitieux

Avec sa cuisine éthique, certifiée EcoCook niveau 4, son ambiance conviviale et ses 60 couverts, le restaurant Quai 14 allie formation, durabilité et plaisir de table. En cuisine ou au service, des participants venus d’horizons variés s’initient ou se perfectionnent aux métiers de la restauration, encadrés par des professionnels aguerris. « À Quai 14, on reçoit plusieurs profils différents », explique Arnaud, encadrant en cuisine. « Nous avons des mesures pour des personnes au chômage, d’autres via l’assurance-invalidité, et encore d’autres dans le cadre du programme EcoLausanne, souvent des migrants ou bénéficiaires du revenu d’insertion. On leur enseigne les bases du métier, mais aussi le savoir-être essentiel pour retrouver confiance. »

I7A9166 | Emploi Lausanne | Quai 14 : quand cuisiner redonne le goût de l’avenir

Karim, un parcours entre quatre pays et mille saveurs

Parmi les participants, Karim impressionne par son calme et son professionnalisme. Avant d’arriver ici, il a déjà derrière lui plusieurs dizaines d’années de carrière en cuisine, du Maroc en passant par l’Espagne et la France, avant la Suisse. « J’ai travaillé 15 ans en Espagne dans divers restaurants, puis 9 ans en France. En Suisse, j’ai eu la chance de cuisiner dans un restaurant espagnol et un autre mexicain. » Son intégration à Quai 14 s’est faite naturellement. « Toute l’équipe, ainsi que le chef, ont été très gentils avec moi. J’ai assez d’expérience pour m’adapter facilement. Je parle espagnol, français, anglais et arabe, ce qui aide beaucoup. »

Pour Karim, cette étape est à la fois une parenthèse d’apprentissage et un tremplin vers de nouveaux projets. « Je pense qu’on apprend tout le temps. Ce restaurant est différent d’un restaurant classique, donc forcément j’y découvre d’autres choses. En Suisse, par exemple, la manière écologique de traiter les déchets est très développée, c’est une approche nouvelle pour moi. »

Une recette, un symbole

 C’est Arnaud qui a lancé le défi : proposer à certains cuisiniers de créer trois recettes originales, dont une pourrait être mise au menu. « Au début, j’ai lancé ce projet à trois cuisiniers, raconte Arnaud. Les propositions de Karim étaient les plus abouties, alors nous en avons choisi une. » Ce fut une belle reconnaissance. « J’étais très content, et surtout fier. Quand je cuisine, je le fais pour les autres, pour leur plaisir. » précise Karim. « Rien ne fait plus plaisir que de voir des personnes qui apprécient mes recettes. C’est une grande fierté pour moi. Je me nourris du plaisir des clients quand ils dégustent mes plats. »

Son plat reflète son histoire culinaire : un mélange des influences ibériques, orientales et méditerranéennes, né en partie de son expérience dans les cuisines espagnoles. « En Espagne, j’ai travaillé avec un chef qui m’a initié aux recettes terre et mer. J’ai voulu reprendre cette idée de mélange, de goût et d’originalité. »

Entre exigence et accompagnement

Le travail en cuisine à Quai 14 se déroule dans un équilibre subtil entre rigueur et bienveillance. « Nous avons de gros volumes à sortir, il faut que tout soit prêt à 11 h 30, donc le job doit être fait », explique Arnaud. « Mais nous sommes aussi là pour accompagner, pour transmettre sans étouffer. Le but n’est pas seulement de former des cuisiniers, mais des personnes prêtes à retrouver un emploi, un équilibre. » Karim le confirme : « Ici, j’ai appris à travailler différemment. Il y a un vrai esprit d’équipe et beaucoup de respect. On nous fait confiance. »

Des transformations visibles

Pour Arnaud, les changements observés chez les participants sont souvent frappants. « Certains arrivent sans vraiment savoir pourquoi ils sont là. Au début, il peut y avoir des réticences, mais très vite, les gens se stabilisent, s’adaptent, et retrouvent de la motivation. Ça se termine toujours positivement. »

« Ce genre de projet, comme celui de Karim, est très valorisant. Quand quelqu’un propose une recette, ça veut dire qu’il ose, qu’il se projette, qu’il a envie d’exister professionnellement. »

Et après ?

Karim ne cache pas ses ambitions : « Si un jour j’en ai la possibilité, j’aimerais ouvrir mon propre restaurant. J’ai toujours rêvé de ça. Je voudrais proposer une cuisine internationale, avec des mélanges : une cuisine marocaine avec une touche européenne, ou, à l’inverse, des plats européens avec une touche orientale. Les mélanges et l’originalité, c’est ma signature. »

Arnaud, lui, garde foi en ces parcours. « Le restaurant Quai 14, c’est un programme de réinsertion, mais on envoie aussi des gens en stage dans d’autres établissements. Et parfois, ça débouche sur un poste fixe. Beaucoup d’enseignes cherchent du personnel et certaines s’adressent à nous. Donc, il y a souvent des suites heureuses. Je pense que tout le monde peut avoir sa chance si on essaye et qu’on persévère. »

Un lieu d’apprentissage et d’espoir

Le restaurant Quai 14 est un lieu propice à la réinsertion, ainsi qu’un espace humain et valorisant. Ici, on cuisine pour les autres, mais on se construit surtout soi-même.

I7A9261 | Emploi Lausanne | Quai 14 : quand cuisiner redonne le goût de l’avenir

Pavé de cabillaud sauce chorizo, écrasé de pommes de terre vitelotte, poivrons grillés

Pour 4 personnes :

• Cabillaud 720 gr
• Chorizo 80 gr
• Pommes de terre vitelotte 500 gr
• Poivrons rouges 3 pièces
• Crème 300 gr
• Échalotte 2 pièces
• Jus de citron 2 CS à soupe
• Romarin 1 branche
• Pour la persillade: 2 gousses d’ail, 60 grammes de persil et 1 dl d’huile d’olive

Recette

Ecrasé de pomme de terre : Mettre les pommes de terre en cuisson dans une casserole d’eau bouillante salée. Égoutter les pommes de terre après cuisson, éplucher et écraser grossièrement puis ajouter la persillade ainsi que le sel et le poivre.

Sauce chorizo : Dans une casserole mettre de l’huile d’olive ainsi que les échalotes émincées, faire suer le tout, ajouter le chorizo en petits cubes, la branche de romarin et le jus de citron. Laisser mijoter 5 minutes à feux moyen. Ajouter la crème laisser cuire à feu doux pendant 5 minutes. Enlever la branche de romarin et mixer le tout. Filtrer la sauce et réserver.

Poivrons grillés : Laver les poivrons, les couper en deux et enlever les pépins. Couper les poivrons à un demi-centimètre d’épaisseur et les faire revenir avec la moitié de la persillade. Egoutter et réserver.

Pour le cabillaud : Assaisonner les pavés de cabillaud avec du sel et du poivre du moulin. Faire chauffer une poêle avec de l’huile d’olive et y ajouter le cabillaud et le cuire 4 à 5 minutes de chaque côté en fonction de l’épaisseur du poisson et votre gout également.

Persillade : Mixer l’ail, le persil et l’huile d’olive.

Dressage de l’assiette : Dans un emporte-pièce, mettre l’écrasé de pommes de terre puis les poivrons, ajouter le pavé de cabillaud, mettre la sauce autour et bon appétit.

Le petit plus du chef Karim : Vous pouvez garder des tranches de chorizo et les passer dans la même poêle que votre poisson et le recouvrir avec.


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Programme

Emploi Lausanne

Crédits

Ivana Mikulic

Jessica Gashi

Alejandro Toro Menadas


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